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Santé, sécurité, environnement - Avril 2019

Publié le
7/5/2019
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ENVIRONNEMENT

  • Amiante – Préjudice d’anxiété : Ouverture de la réparation du préjudice d’anxiété à tous les travailleurs

Rendu par l’Assemblée plénière de la Cour de cassation le 5 avril 2019, un arrêt vient ouvrir le droit à réparation du préjudice d’anxiété à l’ensemble des travailleurs exposés à l’amiante. Jusqu’à présent, cette réparation ne pouvait intervenir que pour les salariés ayant travaillé dans un établissement ouvrait droit à une retraite anticipée, c’est-à-dire dans l’industrie de l’amiante ou dans un chantier naval.

Dorénavant, le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave peut être admis à agir contre son employeur. Le fondement sur lequel cette action est engagée repose sur les règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, peu importe que le salarié ait travaillé ou non dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998.

La Cour de cassation opère là un véritable revirement de jurisprudence, salutaire pour les salariés puisqu’elle leur facilite l’accès à une réparation.

Il semble utile de rappeler que le préjudice d’anxiété correspond à la situation d’inquiétude permanente du salarié face au risque de déclaration à tout moment d’une maladie provoquée par l’amiante. Ce préjudice particulier a été façonné par la Cour de cassation, qui admettait la réparation du salarié qui en était victime à la seule condition qu’il ait travaillé dans un des établissements cités par la loi de 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante.

Dans l’arrêt rendu le 5 avril 2019, la Cour de cassation reconnaît le droit pour le salarié d’agir contre son employeur sur le fondement du droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur (articles L4121-1 à L4121-5 du Code du travail). L’existence du préjudice d’anxiété dans les faits était prouvée par le suivi d’examens médicaux réguliers par le salarié, révélateurs de la permanence de l’anxiété liée à la crainte à tout moment de déclarer une maladie.

  • Crime d’écocide – Reconnaissance : Volonté des sénateurs de faire reconnaître le crime d’écocide dans la loi française

En parallèle d’une reconnaissance progressive sur la scène internationale impulsée par la Cour Pénale Internationale, le crime d’écocide a fait l’objet d’un débat ce mois-ci devant le Sénat. Une proposition de loi avait en effet été déposée ce 19 mars par le sénateur Jérôme Durain et les membres du groupe socialiste à l’Assemblée. Le résultat des travaux de la Commission des lois a ensuite été publié le 10 avril suivant. Le crime d’écocide serait consacré et défini dans un nouvel article 230-1 du Code pénal. Il répondrait à la définition suivante : « le crime d’écocide serait constitué par le fait, en exécution d’une action concertée tendant à la destruction ou la dégradation totale ou partielle d’un écosystème, en temps de paix comme en temps de guerre, de porter atteinte de façon grave et durable à l’environnement et aux conditions d’existence d’une population ».

Les peines encourues sont dissuasives, à savoir vingt ans de réclusion criminelle et 7 500 000 euros d’amende, et peuvent être assorties de peines complémentaires. La « provocation à commettre un écocide » ainsi que « la participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels », seraient passibles des mêmes peines (proposition d’articles 230-2 et 230-3 du Code pénal).

Pourraient ainsi être poursuivies tant les personnes morales que physiques, y compris les ressortissants français en dehors du territoire. L’écocide aurait un caractère imprescriptible, à l’instar du crime de génocide dont le contenu juridique a inspiré les rédacteurs de cette proposition de loi.

La volonté de cette reconnaissance est justifiée par la prise de conscience nationale et globale, sans précédent, de l’urgence climatique. L’action juridique dénommée « l’affaire du siècle » en est une illustration. Cette proposition revêt donc une forte portée symbolique.

Néanmoins, en raison de sa complexité, de sa dimension transnationale et d’une réticence dans les milieux économiques, cette reconnaissance n’a jamais pu aboutir. Par conséquent, l’issue finale de cette proposition de loi semble incertaine. La Commission des lois a estimé par ailleurs dans ses travaux que la rédaction de ce texte législatif souffrait d’imprécisions, allant ainsi à l’encontre de l’exigence constitutionnelle de clarté de la loi pénale. La création d’une nouvelle infraction pénale générale ne lui semble également pas pertinente au regard de l’arsenal juridique déjà existant en la matière. Le texte sera examiné le 2 mai prochain en séance publique.

Pour plus d’informations :
– Consulter le rapport au Sénat n°446 sur « la proposition de loi portant reconnaissance du crime d’écocide » de Marie Mercier

  • Addictions au travail – Prévention : Publication d’un avis de la Plateforme RSE sur la consommation des produits addictifs en milieu professionnel

En France, environ 70% des personnes actives consomment prioritairement du tabac mais aussi de l’alcool et des stupéfiants. Ce constat alarmant a été mis en évidence en janvier dernier dans un avis émis par la Plateforme RSE (Responsabilité Sociétale de l’Entreprise). Cette dernière réunit depuis 2013 l’ensemble des parties prenantes de la RSE que sont les entreprises, les partenaires sociaux, les organisations de la société civile, les chercheurs, les institutions publiques et les réseaux d’acteurs. Elle avait ainsi pour responsabilité, à l’initiative du président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, de rédiger des recommandations pour encourager les entreprises à s’engager dans la prévention et la réduction de ces consommations addictives.

Cet avis a révélé trois vecteurs à l’origine de ces consommations : l’importation de ces produits via la vie privée du salarié, l’acquisition en milieu professionnel (sous forme de pots par exemple) et enfin l’adaptation qui consiste à utiliser ces produits pour « tenir au quotidien ». Sont particulièrement en cause les métiers relatifs à la construction, à l’hébergement, à la restauration, aux arts et spectacles, aux activités récréatives.

Une approche globale serait pertinente pour instaurer une lutte effective : il s’agirait pour les entreprises de solliciter tous ses acteurs, de prévoir des actions d’accompagnement, de soutien etc. Ainsi, la cohésion des acteurs, la prévention primant sur la répression, l’observation quant à la vulnérabilité des salariés, la diffusion d’information sont les maitres mots pour parvenir à cet objectif.

A titre complémentaire, un guide de santé publique a été publié par l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA) en mars dernier. Principalement à destination des professionnels de la prévention, de l’accompagnement et des soins, il évoque néanmoins des axes de prévention, des mesures d’accompagnement pouvant se transposer à toute profession.

Pour plus d’informations :
– Consulter l’avis sur « l’engagement des entreprises pour la prévention des conduites addictives de la Plateforme RSE »
– Consulter le « Guide Repères » élaboré par l’ANPAA

  • Denrées alimentaires – Suspension de la mise sur le marché des denrées alimentaires contenant du dioxyde de titane à partir du 1er janvier 2020 : une mesure bienvenue

Dès 2006, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) avait classé le dioxyde de titane comme « cancérogène possible pour l’homme ». Ensuite, dans une étude de 2017, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) estimait que l’utilisation du dioxyde de titane, plus couramment appelé E171 en tant qu’additif alimentaire, était notamment cancérogène.

Pour donner une idée de l’importance de ce sujet, il faut rappeler que l’association « Agir pour l’environnement » a révélé la présence du E171 dans 300 produits alimentaires. En outre, très récemment, en mars 2019, la même association a révélé qu’il était présent dans les deux tiers des dentifrices par le biais d’un communiqué de presse.

En tout état de cause, ce contexte a poussé les autorités publiques à se pencher sur la question. À cet effet, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), saisie sur ce sujet, a rendu rend un avis le 12 avril 2019, qui laisse encore beaucoup d’incertitudes en suspens, notamment sur l’existence d’un seuil d’innocuité du dioxyde de titane en tant qu’additif alimentaire. C’est pourquoi en application du principe de précaution, les autorités publiques ont suspendu provisoirement et à partir de 2020 la mise sur le marché de denrées alimentaires contenant du dioxyde de titane, par un arrêté du 17 avril 2019. On peut regretter l’effet différé de cette mesure. Cependant les applications du principe de précaution sont assez rares pour que l’on puisse s’en réjouir, même si elles sont en demi-teinte.

Pour plus d’informations :
– Consulter l’avis de l’ANSES relatif aux risques liés à l’ingestion de l’additif alimentaire E171
– Consulter la fiche du dioxyde de titane sur le site de l’ANSES

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SÉCURITÉ

  • Droit d’alerte – protection des lanceurs d’alerte : réforme européenne

Tous ceux qui ont regardé le film « La fille de Brest » savent à quel point la situation des lanceurs d’alerte peut être précaire et ce, même dans le pays des Droits de l’Homme. Pourtant, après ce scandale, la situation juridique n’a pas forcément évolué en faveur d‘une meilleure protection des lanceurs d’alerte en France. Cette fragilité tient au fait qu’ils sont opposés au secret des affaires, car les informations qu’ils révèlent font souvent l’objet de ce régime de protection, prévu par la loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires (1). Malheureusement, le résultat de cette opposition ne leur est, généralement, pas favorable.

Il est vrai que le régime du secret des affaires prévoit un régime dérogatoire à la protection de principe qu’il institue, dans le cadre de « l’exercice du droit d’alerte ». Cependant ce droit est assez strictement encadré. D’abord il faut que la révélation soit désintéressée et de bonne foi. Ensuite il faut qu’elle concerne un crime, un délit, une atteinte grave à un engagement international à la loi ou à un règlement, ou encore une menace ou un préjudice grave pour l’intérêt général. Enfin il faut que le lanceur d’alerte en ait eu personnellement connaissance. En outre, une procédure qui donne la priorité à la voie hiérarchique interne doit être respectée. L’information peut directement être rendue publique seulement en cas de danger grave et imminent ou en présence d’un risque de dommages irréversibles*. Autant de conditions qui font que le potentiel lanceur d’alerte y réfléchit à deux fois avant de déclencher la procédure, puisque s’il s’avère qu’il n’était pas dans les clous, il pourra, en plus de se faire licencier, être sanctionné pour révélation illicite du secret des affaires.

C’est dans ce contexte que la réforme européenne du droit d’alerte voit le jour. Cette dernière va bien dans le sens d’une meilleure protection des lanceurs d’alerte. La Directive sur la protection des personnes dénonçant les infractions au droit de l’Union a été adoptée par le parlement européen, en session plénière, le 16 avril dernier.

Le texte prévoit un champ d’application personnel plus étendu : désormais, les lanceurs d’alerte peuvent révéler des informations qu’ils ont obtenues dans le cadre d’une relation de travail qui a cessé depuis ou lors d’un processus de recrutement. La protection peut être étendue aux proches du lanceur d’alerte, c’est-à-dire toutes les personnes qui sont susceptibles de faire l’objet de représailles. En outre, il suffit que le lanceur d’alerte dispose de motifs raisonnables de croire que l’infraction au droit de l’union qu’il révèle était véridique. On est bien loin de la double conditionnalité de désintéressement et de bonne foi. Enfin, la procédure de révélation publique directe est étendue aux cas de risques de représailles ou de disparitions des preuves.

Toutefois à l’instar de n’importe quelle directive européenne, il va falloir attendre qu’elle soit transposée en droit interne. La directive accorde un délai de deux ans aux États membres pour se conformer à ses dispositions.

* LOI n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (1)

Pour plus d’informations :
– Consulter le communiqué de presse du Conseil de l’Union Européenne
– Consulter le communiqué de presse du Parlement européen

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SOCIAL

  • Licenciement – Faute grave : refuser de travailler avec un collègue justifie un licenciement disciplinaire

La mésentente entre collègues de travail constitue un motif non disciplinaire de licenciement. Ce motif doit être établi par l’employeur par des faits objectifs imputables à l’intéressé (Cass. soc. 22-9-2010 n° 09-40.415).

Toutefois, un récent arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation admet que si les faits reprochés au salarié revêtent un caractère fautif, l’employeur peut se prévaloir d’un licenciement pour motif disciplinaire. Ce licenciement pour motif personnel doit néanmoins être justifiée par une cause réelle et sérieuse (article L1232-1 du Code du travail).

La cause réelle et sérieuse est établie si elle respecte les 3 critères suivants :

  • Elle existe réellement dans les faits
  • Elle est précise et vérifiable
  • Elle est suffisamment importante pour justifier la rupture du contrat de travail

Ainsi, selon la Cour de cassation dans son arrêt rendu le 6 mars 2019, constitue une faute grave justifiant le licenciement immédiat du salarié le fait pour ce dernier, postérieurement à un précédent avertissement, de refuser de travailler avec un autre salarié de son service et de prendre violemment celui-ci à partie à plusieurs reprises.

La qualification de la faute, simple, grave ou lourde, fait varier les conséquences du licenciement. Il semble ici judicieux de rappeler les différences entre ces qualifications :

  • Une faute simple est une faute commise par le salarié, qui ne justifie pas nécessairement la qualification de faute grave. La faute simple peut être reconnue, par exemple, à l’occasion d’une erreur ou d’une négligence commise par le salarié dans le cadre de son travail. Le salarié licencié pour faute simple aura droit à différentes indemnités (de licenciement, compensatrice de préavis et compensatrice de congés payés)
  • Une faute grave du salarié est considérée comme telle dès lors qu’elle résulte d’une violation des obligations du salarié et rend impossible son maintien dans l’entreprise. Les faits fautifs doivent être directement imputables au salarié. La faute grave entraîne le départ immédiat du salarié (Cassation sociale, 21 mars 2000, n° 98-40.130). Le salarié aura seulement droit à l’indemnité compensatrice de congés payés, s’il en remplit les conditions.
  • Une faute lourde du salarié est considérée comme telle lorsqu’elle a pour finalité de nuire à l’employeur. C’est à l’employeur d’apporter la preuve de cette intention de nuire. À défaut, la faute lourde ne peut pas être reconnue (Cassation sociale, 27 mars 2013, n° 11-19.734). Le salarié n’aura également droit qu’à l’indemnité compensatrice de congés payés, s’il en remplit les conditions.

Pour plus d’informations :
– Le site de l’inspection du travail qui présente la gravité des fautes et les motifs du licenciement disciplinaire